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L’éducation civique dans l’enseignement clérical

L’éducation civique dans l’enseignement clérical

(janvier 1956)

Pour le caractère actuel de ce texte, face à la montée des intégrismes religieux, le texte reproduit ci-dessous conserve une actualité édifiante.

Nicolas SMELTEN: éditorial du Bulletin de la Ligue de l’Enseignement janvier-mars 1956

Les citoyens belges, de quelque opinion politique qu’ils soient et quels que soient leurs sentiments religieux, qui n’ont pas subi l’intoxication de la propagande sectaire et mensongère de certains dirigeants cléricaux, n’ont pu que s’indigner du caractère foncièrement incivique des mots d’ordre impudemment lancés par ceux-ci.

(…)

Quelle éducation ces fauteurs d’incivisme ont-ils reçue?

Ouvrons la brochure qui précise pour les écoles confessionnelles la mission éducative de celles-ci; dans le chapitre consacré à l’obéissance aux lois, nous trouvons ces lignes édifiantes:

« Toutefois, les lois civiles ne sont pas obligatoires quand elles sont en contradiction avec les lois de Dieu et de la Sainte-Eglise.

« Lorsque l’autorité commande une chose qui n’est pas permise devant Dieu, qui est contraire à la volonté de Dieu, notamment à l’un ou l’autre commandement de Dieu ou de la Sainte-Eglise, on ne doit pas et on ne peut pas obéir.

« Le motif en est clair. Dans ce cas, l’obéissance à l’autorité civile serait une désobéissance vis-à-vis de d’une autorité supérieure, notamment vis-à-vis de la souveraineté suprême de Dieu ou vis-à-vis de la souveraineté de la Sainte Eglise.

« Donc les lois civiles ne peuvent pas être en contradiction avec celles d’une puissance supérieure et la Sainte-Eglise dit dans quels cas elles ne peuvent pas être observées.

« Dans quelques autres cas, qui doivent être jugés par les jurisconsultes de la Sainte-Eglise, certaines lois ne sont pas obligatoires en conscience, malgré qu’elles puissent être observées. »

Ce qui précède explique – en dépit des raticinations de certains journaux cléricaux – la différence civique entre le serment constitutionnel que prêtent les membres de l’enseignement officiel et celui que prêtent les membres de l’enseignement libre.

Le premier est libellé comme suit: « Je jure fidélité au Roi, obéissance à la Constitution et aux lois du peuple belge.  »

Et voici le second: « Je jure fidélité au Roi et à la Constitution belge. Ainsi m’aide Dieu. »

(…)

Rappelons, par contre, ce que disait à la Chambre française, en 1921, l’Abbé Lemire, député du Nord:

« Je n’admets pas que l’on mendie l’argent de l’Etat quand librement on s’est placé en dehors de lui. … Si je prends de l’argent à l’Etat, demain il pourra me faire subir un contrôle. L’Etat se devra d’imposer ce contrôle, car il ne peut donner son argent à n’importe qui, pour n’importe quoi… . Je veux que l’argent de tous aille aux écoles ouvertes à tous. Si l’on veut un enseignement spécial, distinct, à part, on est libre, et de cette liberté je me contente. En me contentant d’elle, je la sauve! »