
La création du Centre d’Action Laïque – 29 mars 1969
La signature du Pacte scolaire en mai 1959 par les trois grands partis nationaux de l’époque (Parti socialiste belge, Parti libéral, Parti social-chrétien) marque pour la sphère laïque le début d’une période difficile tant sur le plan moral que matériel. L’objectif d’une école unique, neutre et laïque qui avait fait les grands jours du combat militant dans la première moitié du XXe siècle semble avoir été complètement balayé par les nouveaux rapports de force politique en constitution. Désormais plus intéressé par les problématiques économiques, sociales et communautaires, le monde politique socialiste et libéral rechigne à réveiller des conflits idéologiques ou de nature éthique. La Ligue de l’enseignement, parce qu’elle avait fait de l’école laïque une de ses principales revendications, est particulièrement touchée par la perte de relais politique. Pendant dix ans, l’association est traversée par une forme de désillusion qui touche aussi bien sa base militante qu’une partie de ses cadres. Ce phénomène de doute caractérise durant la décennie 1960 la majorité des associations laïques et impacte plus ou moins durement leurs ressources financières et militantes respectives. La prise de conscience d’une certaine forme d’impuissance générale dans le débat public et quelques événements marquants (principalement l’incendie de l’Innovation le 22 mai 1967, à la suite duquel les laïques ne furent pas invités à participer aux cérémonies nationales d’enterrement) poussèrent progressivement une partie des associations et des militants à réfléchir à la constitution d’un front commun laïque. Le Centre d’Action laïque (C.A.L.) fut officiellement créé dans ce sens le 29 mars 1969 par la volonté de quelques associations laïques (il faut surtout mentionner l’influence de la Ligue de l’enseignement et de l’union des anciens étudiants de l’U.L.B.) et de militants (René Toussaint, Robert Haimade, Marthe Van Meulebroeke, Jacques Bernard, Félix Depreter, Lucia De Brouckère, etc.). Le jeune organisme fédérateur se fixa pour objectifs la coordination de l’activité militante des associations membres, ainsi que la représentation, la défense et la promotion de la laïcité belge dans le débat public. Le C.A.L. proposa également une définition claire et commune de la laïcité ; elle serait dorénavant « la volonté de construire une société juste, progressiste et fraternelle, assurant à chacun la liberté de la pensée et de son expression, adoptant le libre examen comme méthode de pensée et d’action, le tout en dehors de tout dogme et en respectant autrui dans ses convictions » (art. 4 de ses statuts inscrits au M.B. du 3 juillet 1969). La création du C.A.L. permit de rendre une nouvelle fois visibles les revendications du mouvement laïque belge. La reconnaissance de ce dernier en tant qu’entité philosophique à part entière par les pouvoirs publics sera l’un des principaux combats des fédérations laïques (C.A.L., U.V.V. et le C.C.L.) au cours des années 70’ et 80’.